À bicyclette
Elles n’ont ni maillot jaune, ni maillot à pois. Par contre, elles ont le sourire et une énergie contagieuse. Une folle amitié les lie grâce au vélo et cela dure depuis 30 ans. Au cœur du jardin botanique de Curepipe, dans le kiosque datant de l’époque victorienne, ces joyeuses mamies arborent fièrement T-shirts, casquettes et vélos, dont un de la marque Gitane, vieux de 25 ans. La majorité d’entre elles se connaissent depuis le collège. Parmi le groupe, il y a les beaux yeux bleus de Colette Hardy, la doyenne de la bande qui aura 90 ans en août. «Le vélo nous apporte l’indépendance. Nous partions de Curepipe pour aller dans chaque coin du pays. Nous avons sillonné l’île, découvert des paysages à couper le souffle, rencontré des gens formidables et même quelquefois partagé nos repas avec eux », explique Colette. Aucune n’a jamais voulu être championne, le vélo est le véhicule de leur liberté. «Ce sentiment de liberté est enivrant. Je pédale depuis l’âge de 12 ans. Mes parents m’interdisaient de sortir. J’ai donc demandé un vélo pour pouvoir prendre l’air», raconte Geneviève Tyack, 75 ans. Aujourd’hui, elle pédale régulièrement un demikilomètre pour traverser Rivière-Noire afin d’aller rendre visite à sa tante Aline Pilot, centenaire. Impossible de raccrocher pour cette adorable grand-mère de 12 petits-enfants. Sa belle-sœur, Evelyne Tyack, qui a deux filles et trois petites-filles, fait elle aussi du vélo avec une énergie indomptable, comme ses amies : Danielle de Spéville, 68 ans, Chantal Noël, 77 ans, ou Marizette Koenig, 80 ans. Et si elles ne pédalent pas, elles font de la marche. Sans activité, elles perdraient leur joie de vivre. Et les maris dans tout ça ? «Ils nous ont toujours soutenues , assure Geneviève. Parfois, on ne leur disait pas où on allait car ils auraient été inquiets de notre trajet !»
D’où viens-tu Denthupos ? Lors d’une escale du groupe dans un restaurant de l’Est, au moment du dessert, la serveuse explique qu’elle n’a que des glaces à leur proposer et qu’elles sont servies «dans thu pots». Cette drôlerie les a tellement amusées qu’elles ont baptisé leur club ainsi. Les Denthupos ont même leur hymne. L’air est familier, c’est celui de Viens boire un p’ti coup à la maison. Les paroles ont été écrites par Josiane Leclézio, Raymonde Eynaud et Bernadette Piat. Les filles entonnent souvent ce chant à tue-tête.
L’AVIS DU DOCTEUR Pascale Dinan, gériatre «La pratique régulière d’une activité physique a des bénéfices multiples chez les personnes âgées. Elle entretient l’autonomie fonctionnelle et renforce les capacités musculaires et les performances motrices. L’exercice d’endurance permet de développer une bonne adaptation cardiaque et une régulation naturelle de la pression artérielle. La qualité du sommeil et la stimulation des fonctions cognitives sont aussi améliorées. L’effet de bien-être est subjectif mais il a son importance, tout comme le fait de rompre l’isolement en s’adonnant à une activité entre amis. Le facteur limitant est le ressenti de l’individu (douleurs articulaires, fatigue musculaire, essoufflement). Le temps de pratique idéal est le même que pour tout adulte, soit 3 heures par semaine avec une intensité adaptée à la personne. Un bon équilibre nutritionnel est indispensable.»